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Jeux Vidéo Queer : une nouvelle ère de représentation LGBTQIA+

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Jeux Vidéo Queer

Introduction

Longtemps absents ou cantonnés à des stéréotypes, les personnages LGBTQIA+ trouvent enfin leur place dans le monde vidéoludique. Les jeux vidéo queer ne sont plus une niche confidentielle : ils s’imposent comme des œuvres puissantes, inclusives et créatives. De studios indépendants à de grandes productions AAA, la diversité sexuelle et de genre gagne en visibilité et en profondeur.

Mais qu’entend-on réellement par « jeux vidéo queer » ? Comment cette nouvelle vague change-t-elle la narration, la représentation et l’expérience de jeu ? Explorons ensemble cet univers riche, à travers une analyse de ses enjeux et une sélection d’exemples marquants.


Qu’est-ce qu’un jeu vidéo queer ?

Un jeu vidéo queer désigne un jeu qui met en avant des thématiques LGBTQIA+, que ce soit à travers son scénario, ses personnages, ses dialogues ou ses mécaniques de jeu. Il ne s’agit pas seulement d’ajouter une option de romance homosexuelle, mais de proposer un point de vue alternatif, souvent en marge des normes dominantes.

Les jeux queer peuvent :

  • Inclure des personnages LGBTQIA+ avec des rôles centraux et non stéréotypés.
  • Explorer des thématiques identitaires, comme la transidentité, la non-binarité ou la découverte de son orientation sexuelle.
  • Être créés par des développeur·se·s queer, exprimant leur vécu à travers le médium.
  • Défier les conventions traditionnelles du gameplay ou de la narration, en écho aux identités queer elles-mêmes.

L’évolution de la représentation LGBTQIA+ dans les jeux vidéo

Des débuts timides et caricaturaux

Durant les années 1980-1990, les personnages queer apparaissent rarement dans les jeux, et lorsqu’ils le font, c’est souvent sur un mode comique, ridicule ou hyper-sexualisé. On pense à Birdo dans Super Mario Bros. 2 (souvent considéré comme un personnage trans), ou à des ennemis travestis dans des jeux comme Final Fight.

L’émergence de choix inclusifs

Au début des années 2000, certains studios commencent à intégrer des options de romance ou de sexualité plus diversifiées. Les jeux de rôle, en particulier, ouvrent la voie :

  • The Sims permet les relations homosexuelles depuis ses premières versions.
  • Mass Effect et Dragon Age offrent des choix de romance queer dans un univers fantastique ou futuriste.

Mais ces options restent souvent secondaires, comme un « bonus » laissé à l’initiative du joueur, sans incidence majeure sur le récit.


Les jeux indépendants : moteur de la scène queer

Pourquoi les jeux indés sont-ils essentiels ?

Les studios indépendants ont moins de contraintes commerciales, ce qui leur permet d’aborder des sujets plus intimes ou engagés. De nombreux jeux queer marquants viennent de cette scène alternative, portée par des créateur·rice·s LGBTQIA+ souhaitant raconter leur propre histoire.

Exemples de jeux vidéo queer indépendants

Gone Home (2013)

Développé par Fullbright, ce jeu d’exploration narrative met le joueur dans la peau d’une jeune femme revenant chez elle après un long voyage. Elle y découvre des lettres laissées par sa sœur, qui retracent son histoire d’amour avec une autre jeune fille. Gone Home traite de l’homosexualité avec une grande sensibilité, sans jamais tomber dans le pathos.

If Found… (2020)

Un jeu bouleversant développé par Dreamfeel, qui suit le journal intime de Kasio, une jeune femme trans en Irlande. À travers des illustrations à effacer et des textes poignants, le jeu aborde la dysphorie, les conflits familiaux, et la quête d’identité. L’expérience est minimaliste mais profondément immersive.

A Normal Lost Phone (2017)

Ce jeu mobile vous met entre les mains d’un téléphone abandonné. En parcourant ses messages, photos et applis, vous découvrez la vie de Sam, un·e adolescent·e trans en pleine transition. L’approche « voyeuriste » du gameplay rend la narration d’autant plus percutante.


Les personnages LGBTQIA+ dans les jeux AAA

Une reconnaissance progressive

Les gros studios commencent enfin à proposer des personnages LGBTQIA+ crédibles, forts et nuancés. Même si cela reste parfois timide ou maladroit, des avancées notables ont été réalisées.

Exemples emblématiques

Ellie – The Last of Us Part II

Ellie est l’un des personnages les plus marquants de la dernière décennie. Ouvertement lesbienne, elle n’est pas définie uniquement par son orientation : c’est une héroïne complexe, attachante, et profondément humaine. Sa relation avec Dina est centrale dans le jeu, traitée avec respect et émotion.

Lev – The Last of Us Part II

Lev est un personnage transgenre, un jeune garçon rejeté par sa communauté religieuse. Son arc narratif aborde la transidentité de façon frontale, dans un contexte post-apocalyptique violent. Une représentation rare dans un jeu AAA.

Parvati – The Outer Worlds

Dans ce RPG de science-fiction, Parvati est une ingénieure asexuelle et romantique. Son orientation est intégrée avec délicatesse, et elle fait partie des compagnons les plus aimés des joueurs.


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Pourquoi les jeux queer sont importants ?

Briser les normes

Le jeu vidéo est un média puissant, capable d’impliquer émotionnellement les joueurs. En proposant des récits LGBTQIA+, on brise les représentations hétéro-normées, on questionne les stéréotypes, et on ouvre des espaces de réflexion.

Créer un sentiment de reconnaissance

Pour de nombreux joueurs et joueuses queer, voir leur identité représentée avec respect est une source de réconfort, voire d’empowerment. Cela contribue à renforcer l’estime de soi et le sentiment d’appartenance à une communauté.

Éduquer par le gameplay

Les jeux queer permettent aussi aux personnes cis-hétéro de mieux comprendre les enjeux LGBTQIA+. À travers l’empathie ludique, le joueur se met dans la peau d’un·e autre, et vit son quotidien, ses doutes, ses luttes.


Le queer coding et ses limites

Parfois, des personnages sont « queer codés » : leur design, leur façon de parler ou d’agir suggèrent une identité queer sans que cela ne soit jamais affirmé. Cela peut être un outil de représentation indirecte… mais aussi un piège.

Exemples de queer coding

  • Voldo (Soul Calibur) ou Zelos (Tales of Symphonia) sont souvent perçus comme queer, mais sans confirmation.
  • James Sunderland (Silent Hill 2) est parfois analysé comme un homme refoulé, bien que ce ne soit jamais explicité dans le jeu.

Dangers du queer coding

  • Cela maintient les identités queer dans le non-dit, l’implicite.
  • Cela peut renforcer des caricatures, comme le « méchant efféminé » ou la « femme fatale lesbienne ».

Une diversité d’identités encore à explorer

Si les représentations gay et lesbiennes sont de plus en plus courantes, les autres identités LGBTQIA+ restent parfois dans l’ombre.

Personnages trans et non-binaires

Même si des jeux comme Tell Me Why (avec un héros trans masculin) ou Celeste (dont la créatrice est trans) ouvrent la voie, la visibilité trans reste limitée.

Personnages intersexes, pansexuels, asexuels…

Ce sont des identités encore rares dans le jeu vidéo. Leur présence serait pourtant précieuse pour normaliser ces orientations et mieux faire comprendre leur réalité.


Vers un futur plus inclusif ?

La tendance est claire : les jeux queer gagnent en visibilité, en qualité et en popularité. De plus en plus de festivals et prix mettent en avant la diversité, comme le « Games for Change », ou le Gayming Awards.

Ce que les joueurs peuvent faire

  • Soutenir les développeur·se·s queer : via l’achat, le partage, ou le financement participatif.
  • Demander plus de diversité dans les productions mainstream.
  • Créer eux-mêmes des jeux inclusifs, grâce à des outils accessibles comme Twine, RPG Maker ou Unity.

Conclusion

Les jeux vidéo queer ne sont plus une exception : ils participent à redéfinir les règles de la narration vidéoludique. En mettant en scène des personnages LGBTQIA+ riches, en abordant des thèmes identitaires profonds, ou simplement en offrant une alternative aux récits normés, ces jeux changent la donne.

Qu’ils soient intimistes, expérimentaux ou spectaculaires, ils nous rappellent que le jeu vidéo peut être un espace de liberté, de représentation et de réinvention. Il ne tient qu’à nous, joueuses et joueurs, de les faire vivre.