Censure de « Barbie » à Noisy-le-Sec
Une projection annulée sous la menace
La ville de Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) a été contrainte d’annuler une projection en plein air du film Barbie, réalisé par Greta Gerwig, à la suite de menaces verbales exercées par un petit groupe de jeunes opposés à la diffusion du long-métrage. Le maire communiste, Olivier Sarrabeyrouse, a dénoncé des pressions exercées au nom d’ »arguments fallacieux traduisant l’obscurantisme », venant d’une minorité d’habitants.
Prévue le vendredi 15 août à 21h dans le cadre du festival « Les estivales de Noisy », la séance gratuite a été annulée après que « entre une dizaine et une quinzaine d’individus ont encerclé les agents » en charge de l’installation, selon le maire. Les menaces étaient explicites : « Si vous installez, on démonte tout et on met un terme à votre séance », auraient lancé les opposants, accusant le film de promouvoir « l’homosexualité » et de porter atteinte à « l’intégrité de la femme ». Le maire regrette une instrumentalisation idéologique, jugeant que les protestataires n’avaient probablement pas vu le film, qui, en réalité, propose une critique du patriarcat dans un cadre majoritairement hétéronormé.
Soutien des habitants et réaction des autorités
Le choix du film s’était pourtant fait en concertation avec les habitants de la commune, et notamment ceux du quartier du Londeau, où la projection devait avoir lieu. « C’est une forme de censure morale », déplore Olivier Sarrabeyrouse, qui précise dans une publication Facebook avoir déposé plainte pour « mise en danger des agents du service public » et « menaces ». Il qualifie les auteurs des pressions de « voyous » agissant pour des motivations politiques.
Le ministère de la Culture a également réagi en déposant plainte pour « entrave à l’exercice de la liberté de diffusion de la création artistique ». La ministre Rachida Dati (LR) a condamné une « nouvelle atteinte grave à la programmation, privant familles et enfants d’une activité culturelle ». Elle rappelle avoir déjà engagé des actions fermes contre ce type de pressions, qu’elle assimile à une forme émergente de délinquance.
Une condamnation politique transpartisane
La controverse a suscité des réactions au-delà des clivages partisans. À gauche, Aurélie Trouvé, députée LFI-NFP de Seine-Saint-Denis, a exprimé son indignation : « Encore une fois, ce sont les familles et les enfants qui sont privés de moments de culture et de convivialité. Je soutiens le maire et les agents menacés. La culture doit rester un outil d’émancipation, d’unité et d’ouverture. »
Du côté de la droite, la sénatrice LR Valérie Boyer évoque une emprise croissante d’un fondamentalisme religieux, estimant que « des intégristes islamistes exercent un contrôle social fort et efficace », accusant au passage le maire PCF de céder à leurs pressions. Ce dernier répond fermement : « Je n’ai pas cédé à une pression. J’ai agi en tant que maire responsable pour assurer la sécurité des agents et des familles. » Il dénonce une « manipulation politicienne d’une poignée d’individus dont l’objectif est d’entraver nos actions municipales à l’approche des élections. »