Vatican premier pèlerinage LGBTQIA+
Une première historique dans le cadre du Jubilé 2025
À l’occasion du Jubilé 2025, un événement inédit aura lieu au Vatican : un pèlerinage LGBTQIA+, organisé par l’association italienne La Tenda di Gionata et soutenu par d’autres structures du monde entier. Inscrit discrètement au programme officiel pour les 5 et 6 septembre, cet événement figure dans le calendrier sous l’intitulé générique de « pèlerinage de l’association Tenda di Gionata et d’autres associations ». Environ 1 300 personnes, dont une majorité d’Italiens, sont attendues à Rome pour participer à des temps de prière, de discussion, une messe à l’église du Gesù, ainsi qu’une procession jusqu’à la basilique Saint-Pierre.
Selon Il Messaggero, l’initiative aurait reçu l’approbation du pape François à la fin de l’année 2024, peu avant sa disparition le 21 avril 2025. Toutefois, le projet a connu une période d’incertitude : son retrait temporaire de l’agenda officiel après la mort du pape a révélé des tensions internes au Vatican. Il a finalement été réintégré, signe d’une forme de reconnaissance institutionnelle.
Une quête de visibilité au sein de l’Église
Pour les initiateurs du pèlerinage, il ne s’agit pas d’un événement militant mais d’un acte de foi et d’inclusion. « Ce fut poussif et cela reste timide, mais l’enjeu est celui de la visibilisation et de la reconnaissance. À cet égard, c’est un succès », affirme Cyril de Compiègne, président de l’association D&J Arc-en-ciel, qui prendra part à l’événement.
Des rumeurs circulant sur Internet ont affirmé que la procession serait marquée par un crucifix aux couleurs arc-en-ciel. Alessandro Previti, représentant de La Tenda di Gionata, a précisé qu’une croix multicolore appartenait simplement à l’un des groupes participants, actuellement en marche à travers l’Italie. Les pèlerins porteront les crucifix en bois habituellement fournis par le Vatican. « Si quelqu’un souhaite porter un tee-shirt arc-en-ciel, libre à lui, mais notre message est celui de la normalité. Nous sommes des pèlerins comme les autres », souligne M. Previti.
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Un événement spirituel et non militant
Loin des marches des fiertés, ce pèlerinage se veut un moment de prière partagé. « Ce n’est pas une manifestation, pas une gay pride », insiste Claire Bévierre, présidente de l’association Reconnaissance, qui réunit des proches de personnes LGBT. « C’est une démarche de prière et un simple rappel que l’Église est ouverte à tous. Comme il y a eu le pèlerinage des anciens, des jeunes, ou des professionnels, celui-ci est destiné aux personnes LGBT et à leurs familles. »
Le soutien discret du nouveau pape Léon XIV
Un signe encourageant est venu en début de semaine, lorsque le pape Léon XIV a reçu en audience le père James Martin, prêtre jésuite américain reconnu pour son engagement auprès des catholiques LGBT. « Ce fut une rencontre chaleureuse, même sur un sujet difficile comme celui-là. Il s’est montré parfaitement détendu », a déclaré le père Martin au Monde.
Bien que le nouveau pontife ne se soit pas encore exprimé publiquement sur ces questions, le prêtre rapporte que « le message qu’il m’a fait passer est qu’il veut poursuivre l’approche d’ouverture et d’accueil de son prédécesseur ». Cette volonté d’inscription dans la continuité de François demeure néanmoins prudente et ne garantit pas de nouvelles initiatives concrètes à court terme.
Une Église encore divisée face à l’héritage de François
L’ouverture impulsée par le pape François, notamment à travers la déclaration Fiducia supplicans de décembre 2023, continue de susciter des débats. Ce texte autorisant la bénédiction des couples « en situation irrégulière » – y compris homosexuels – a été l’un des marqueurs de son pontificat, mais a aussi divisé les rangs ecclésiastiques. Face aux résistances, particulièrement en Afrique, le Vatican a fini par accorder aux évêques la liberté d’appliquer ou non ces bénédictions selon les réalités culturelles locales.
En France, les réactions ont été tout aussi nuancées. Les évêques ont adopté une interprétation stricte du texte, privilégiant la bénédiction des personnes plutôt que des couples.
Une avancée lente mais tangible
Malgré les résistances, certains acteurs de terrain estiment que des progrès réels sont à l’œuvre. « On voudrait toujours que les choses aillent plus vite, mais on doit être patients et accepter ce premier pas », reconnaît Alessandro Previti.
Claire Bévierre partage cette vision : « Nous ne devons pas nous focaliser sur ce qui se passe au sommet. Nous agissons à l’intérieur de l’Église, où il y a de vraies évolutions. » Elle rappelle que près de 60 % des diocèses français proposent aujourd’hui des pastorales spécifiques pour les personnes LGBT et leurs familles, signe d’un changement progressif mais durable.