Aller au contenu
Accueil » Le Brésil Lance une IA pour Combattre les Discours Anti-LGBTQ+ en Ligne

Le Brésil Lance une IA pour Combattre les Discours Anti-LGBTQ+ en Ligne

Brésil IA combattre discours anti-LGBTQ+
Rate this post

Brésil IA combattre discours anti-LGBTQ+

Une technologie de surveillance contre la haine numérique

Le gouvernement brésilien a récemment dévoilé une plateforme innovante baptisée Platform of Respect (Plateforme du respect), visant à détecter et signaler les contenus en ligne considérés comme haineux ou trompeurs à l’encontre des personnes LGBTQ+. Développée en collaboration avec l’ONG Aliança Nacional LGBTI+, cette initiative a été bien accueillie par les défenseurs des droits queer, tout en suscitant des inquiétudes concernant ses implications sur la liberté d’expression.

Aletheia : l’intelligence artificielle au service de la vigilance

Annoncée le 16 septembre par le ministère brésilien des Droits de la personne, cette initiative repose sur Aletheia, un outil d’intelligence artificielle capable d’examiner en continu divers espaces numériques — réseaux sociaux, blogs et médias — pour y repérer des propos qualifiés de désinformation ou de discours haineux. L’IA s’attaque particulièrement aux contenus remettant en cause les identités de genre ou les réalités trans.

Ce projet est partiellement soutenu financièrement par la députée trans Erika Hilton, figure de proue de la représentation LGBTQ+ au sein du Parlement brésilien. Selon Jean Muksen, coordinateur du projet, Aletheia a été conçue sur une période de 18 mois par une équipe pluridisciplinaire composée de juristes, de communicants et de journalistes. Le système comprend le portugais dans toute sa complexité, y compris les nuances d’ironie et de sarcasme souvent utilisées dans des propos transphobes ou homophobes.

De la détection à l’action en justice

Lorsqu’un message est identifié par l’IA, il est automatiquement archivé dans une base de données. Un examen manuel est ensuite effectué par un avocat ou une avocate de l’ONG partenaire. Si le contenu est jugé conforme aux critères de désinformation ou de discours haineux, il peut être transmis aux autorités judiciaires compétentes, ouvrant ainsi la voie à d’éventuelles poursuites pénales.

Pour Jean Muksen, l’objectif est clair : « responsabiliser légalement les auteur·rice·s de propos diffamatoires ou discriminatoires ». Il insiste sur les effets concrets de ces discours en ligne : « La haine en ligne a des conséquences bien réelles : elle alimente les agressions, les suicides et les politiques d’exclusion. Le Brésil devait agir. »


Lire aussi : L’Italie de Meloni Veut Restreindre les Discussions sur la Sexualité LGBTQ+ à L’école


Un outil controversé entre protection et censure

Bien que saluée par de nombreuses associations LGBTQ+ comme un outil de protection indispensable, cette plateforme est également critiquée, notamment par des voix conservatrices qui y voient une menace pour la liberté d’expression.

Isabella Cêpa, militante connue pour ses positions critiques envers les personnes trans, a vivement dénoncé cette démarche dans The European Conservative. Elle affirme : « Utiliser l’intelligence artificielle pour traquer les dissidents politiques, c’est quelque chose qu’on croyait réservé à d’autres régimes. Aujourd’hui, la société brésilienne doit craindre d’être punie simplement pour avoir dit que deux et deux font quatre. »

Ces réactions mettent en lumière une tension mondiale persistante : comment encadrer les discours haineux sans restreindre de manière excessive la liberté de parole, surtout lorsque des algorithmes interviennent dans l’évaluation des propos publics?

Un contexte juridique déjà en place contre les discriminations

Depuis 2019, la Cour suprême fédérale du Brésil assimile la discrimination envers les personnes LGBTQ+ à une forme de racisme, en faisant une infraction pénale équivalente aux discours antisémites ou racistes. De plus, la transphobie est explicitement criminalisée dans le Code pénal brésilien.

Ces avancées législatives, remarquables à l’échelle de l’Amérique latine, s’inscrivent dans un contexte national préoccupant : le Brésil reste l’un des pays où le taux d’assassinats de personnes trans et queer est parmi les plus élevés au monde, selon les données de l’ONG Transgender Europe.

Une initiative pionnière aux répercussions mondiales

Avec cette plateforme, le Brésil s’impose comme l’un des premiers pays à confier à une intelligence artificielle le rôle de rempart contre la haine en ligne ciblant les minorités LGBTQ+.

Reste à savoir si cet équilibre entre protection des minorités et respect de la liberté d’expression peut être maintenu. Si le projet évite les dérives autoritaires, il pourrait devenir un modèle pour d’autres pays confrontés à la montée des discours anti-LGBTQ+ en ligne. Des réflexions similaires sont déjà en cours en Europe, en Amérique latine et au Canada, notamment dans le cadre des projets de loi C-63 et C-11, qui visent à mieux encadrer la régulation numérique.

Les Dernières Actualités

Étiquettes: