Vers une interdiction des femmes transgenres dans les compétitions féminines ?
Alors que les Jeux olympiques de Los Angeles approchent, le Comité international olympique (CIO) pourrait revoir ses règles concernant la participation des femmes transgenres. Bien qu’aucune décision officielle n’ait encore été annoncée, plusieurs sources anticipent une modification significative des critères d’éligibilité d’ici un an. Cette orientation ferait suite à un durcissement des politiques aux États-Unis, pays hôte des JO 2028.
Un rapport scientifique relance le débat
Les spéculations ont gagné en intensité après qu’un rapport présenté aux membres du CIO par le Dr Jane Thornton, directrice de la santé, de la médecine et des sciences, a mis en évidence des « avantages physiques permanents » associés à une puberté masculine. Dans la foulée, Sky News rapporte que l’organisation envisagerait la mise en place de tests de vérification du sexe pour toutes les disciplines olympiques avant 2028.
Nouvelle direction et volonté d’harmonisation
Sous la présidence de Kirsty Coventry, ancienne nageuse olympique zimbabwéenne, le CIO cherche à instaurer des critères universels, là où il s’en remettait jusqu’alors aux fédérations internationales. Cette volonté s’est concrétisée par la création, en septembre, d’un groupe de travail baptisé « Protection de la catégorie féminine », chargé d’étudier les meilleures options pour préserver l’équité dans les compétitions féminines.
Aucune décision formelle à ce jour
Un porte-parole du CIO a toutefois précisé qu’aucune décision n’avait été prise pour l’instant. Selon lui, le Dr Thornton n’a fait qu’informer les membres du comité de l’état des connaissances actuelles lors des dernières réunions de commission. Jusqu’ici, les règles en vigueur autorisent toujours les athlètes transgenres à participer aux JO, à condition de respecter certaines conditions fixées par les fédérations concernées.
Une pression croissante venue des États-Unis
Le contexte politique américain pèse lourdement sur le dossier. En juillet, sur la base d’un décret signé par Donald Trump, le Comité olympique et paralympique des États-Unis (USOPC) et plusieurs fédérations ont exclu les femmes transgenres de nombreuses compétitions féminines, invoquant des enjeux d’équité et de sécurité. En parallèle, plus de 20 États américains ont adopté des lois restreignant leur participation dans le sport scolaire et universitaire.
L’affaire Lia Thomas : catalyseur du débat
L’athlète transgenre Lia Thomas, nageuse universitaire devenue figure emblématique du débat, a cristallisé les tensions après ses victoires en 2022. Malgré son respect des règles de la NCAA, World Aquatics a ensuite modifié sa politique en interdisant la participation des athlètes ayant vécu une puberté masculine, excluant ainsi Thomas des JO de Paris 2024.
Cette exclusion s’est vue renforcée en 2025 par un décret fédéral américain intitulé « Garder les hommes hors du sport féminin », redéfinissant le sexe biologique et interdisant les femmes trans dans les équipes féminines. L’université de Pennsylvanie a alors annulé plusieurs records de Lia Thomas, illustrant la pression institutionnelle croissante.
Une décision sous influence économique et politique
Le CIO se retrouve dans une position délicate : préserver l’universalité des Jeux tout en tenant compte d’un pays hôte influent, à la fois contributeur majeur en droits TV et en sponsoring, où la question transgenre est devenue un sujet explosif. Cette pression extérieure pourrait accélérer l’adoption de nouvelles règles plus restrictives.
Des interdictions déjà en vigueur dans plusieurs fédérations
Indépendamment du CIO, plusieurs fédérations internationales ont déjà modifié leurs règlements. World Rugby, World Athletics ou encore certaines instances nationales de football, comme la Fédération anglaise (FA), interdisent désormais la participation des athlètes transgenres ayant connu une puberté masculine dans les compétitions féminines.
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Jeux et polémiques : les précédents
Depuis Tokyo 2021, plusieurs athlètes transgenres ou intersexes ont marqué l’histoire olympique. Laurel Hubbard, haltérophile néo-zélandaise, fut la première femme transgenre à concourir, tandis que Quinn, joueur·euse canadien·ne non binaire, a remporté l’or en football. En 2024, Valentina Petrillo a été la première athlète transgenre à participer aux Jeux paralympiques.
Parallèlement, les athlètes intersexes ont aussi été touchées. Caster Semenya, double championne olympique sud-africaine, a été exclue du 800 mètres en raison de taux de testostérone jugés trop élevés. La boxeuse algérienne Imane Khelif a, elle, été accusée à tort d’être transgenre et disqualifiée de manière controversée.
Une confusion persistante entre athlètes transgenres et intersexes
Ces affaires mettent en lumière la confusion fréquente entre personnes transgenres et sportives dites « DSD » (disorders of sex development). Bien que relevant de réalités physiologiques, juridiques et médicales différentes, ces deux groupes sont souvent amalgamés dans les débats publics et les décisions des instances sportives.
L’absence d’un protocole clair, combinée à une pression politique croissante, pourrait mener à des décisions généralisées qui ne tiendraient pas compte des distinctions nécessaires entre ces profils. Le risque : une exclusion systématique sous couvert d’équité, au détriment de la diversité des identités.
Une réforme à portée historique
À l’aube des Jeux de Los Angeles, le CIO semble prêt à tourner une page de son histoire en redéfinissant les critères d’accès aux compétitions féminines. Si une interdiction globale devait être adoptée, elle marquerait un tournant : les JO deviendraient non seulement le théâtre de performances sportives, mais aussi celui de décisions fondamentales sur la reconnaissance des identités.






