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Guets-apens Homophobes : Huit ans de Prison

Guets-apens homophobes huit ans de prison
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Guets-apens homophobes huit ans de prison

Un piège tendu à des hommes gays : huit ans de prison pour Ilies B.

Reconnu coupable d’avoir attiré, en décembre 2022, quatre hommes homosexuels via des sites de rencontre pour les dépouiller dans les caves de l’immeuble de sa mère, Ilies B., 28 ans, a été condamné à huit ans de réclusion criminelle par la cour d’assises d’appel de l’Essonne. Cette décision, prononcée après un second procès, intervient après que l’accusé a finalement admis le caractère homophobe de ses actes. Silencieux et impassible à l’annonce du verdict, Ilies B. voit sa peine réduite de cinq ans par rapport au jugement initial, bien qu’il encourait la perpétuité. Le seul moment d’émotion est survenu lorsque sa mère, malade et âgée, a témoigné de la détresse dans laquelle cette affaire l’a plongée.

Une méthode violente et ciblée, révélatrice d’un phénomène grandissant

Les faits, bien que simples, illustrent une tendance préoccupante de guets-apens visant spécifiquement des homosexuels. L’accusé utilisait les plateformes Coco (désormais fermée par la justice) et plansm.com pour contacter ses cibles. Il les invitait ensuite dans l’immeuble parisien où il résidait, les faisait descendre à la cave, puis les menaçait avec un couteau – un Opinel ou une feuille de boucher. Les victimes étaient ensuite forcées de s’allonger sous une chaise, le temps que leur agresseur s’éloigne. Dans l’un des cas, Ilies a mis en scène l’intimidation en raclant sa lame contre une canalisation pour renforcer l’effet dramatique de la scène, « comme dans les films ».

Une reconnaissance tardive du mobile homophobe

Lors du premier procès en septembre 2024, Ilies B. avait reconnu les extorsions mais rejeté l’utilisation d’une arme et nié toute motivation homophobe, malgré des insultes relevées comme : « Va crever sale pédé ». Il affirmait avoir ciblé des homosexuels uniquement parce qu’ils se déplaçaient « plus facilement ». Ces déclarations n’avaient pas empêché les juges de retenir les circonstances aggravantes : usage d’arme et discrimination liée à l’orientation sexuelle. Pour les victimes, cette première audience avait laissé un goût d’inachevé. En faisant appel, Ilies espérait un allègement de peine, mais la cour attendait surtout qu’il prenne la mesure de ses actes.

Un revirement à l’audience d’appel

Lors du procès en appel, après trois ans de détention, l’évolution du discours d’Ilies B. est restée limitée. D’abord figé dans le déni du mobile homophobe, il finit par admettre avoir proféré des insultes : « Je suis profondément désolé… J’ai dû répéter ce que j’entendais dans le quartier. » Encouragé par sa sœur à « assumer », il concède tardivement la vérité, suscitant toutefois le scepticisme du président de la cour, Michaël Humbert, qui souligne la nécessité de prendre conscience de ses « angles morts », ces zones d’ignorance volontaire qui empêchent de voir la portée réelle de ses actes.


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Des victimes durablement marquées

Les quatre hommes agressés par Ilies ont témoigné de séquelles profondes, toujours présentes trois ans après les faits. Maxime, fonctionnaire de 36 ans, a mis fin à sa vie sexuelle. Dylan, 31 ans, a trouvé un soutien essentiel dans sa famille sans lequel il affirme qu’il ne serait plus en vie. Romain, 46 ans, a vu sa pratique du piano anéantie par une blessure au pouce causée par la lame de l’agresseur. Quant à Florent, 29 ans, photographe, il vit avec une culpabilité pesante et un sentiment permanent de méfiance. Tous décrivent un traumatisme intime, renforcé par le contexte de la rencontre.

Une stratégie assumée, des préjugés révélateurs

L’accusé nie toute attirance pour les hommes, expliquant que les photos envoyées étaient issues de recherches sur Google. Il justifie son ciblage des homosexuels par un simple « tuyau » et des supposés avantages logistiques. Il admet avoir contacté plus de 80 hommes via plansm.com pour quelques centaines d’euros. Il pense aussi, à tort, que ces victimes « n’iraient pas porter plainte ». Ces préjugés, selon la cour, suffisent à établir la motivation discriminatoire des faits. L’enquête n’a d’ailleurs pas été complexe : Ilies ne dissimulait ni son visage ni son adresse IP, et les victimes avaient même connaissance du digicode de l’immeuble.

Le procès d’un système de violences ciblées

Pour les avocats des parties civiles, ce procès dépasse le simple cadre d’un vol. « Il s’agit d’une attaque contre ce qui rend les victimes différentes », souligne Me Jean-Baptiste Boué-Diacquenod. Si une certaine progression est reconnue, la sincérité du repentir de l’accusé reste questionnée. La défense, quant à elle, insiste sur le fait qu’Ilies n’a plus tenté de nier les faits. L’avocate générale Isabelle Poinso replace le procès dans un contexte plus large : celui de la banalisation des violences homophobes. Elle rappelle qu’une agression similaire est signalée chaque semaine, et insiste sur le besoin de reconnaissance des victimes.

Une décision judiciaire lourde de sens

En rendant son verdict, la cour a choisi de souligner la gravité de ces actes commis dans un contexte intime, celui de l’attente d’un rapport sexuel. « S’approcher d’un partenaire, c’est exposer son intimité », a rappelé le président de la cour. L’irruption brutale de la violence dans cet espace rend le traumatisme encore plus profond. Ce jugement marque une reconnaissance judiciaire claire : les victimes de guets-apens homophobes ne sont plus ignorées, et la justice désigne enfin les véritables responsables. Près de 50 ans après l’affaire du Manhattan, le regard judiciaire a changé.

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